Samar KHAMLICHI

Professeure chercheure

Bonjour, avant tout, pouvez-vous vous présenter SVP ?

Samar KHAMLICHI, professeure-chercheure à l’Institut des Etudes Africaines, Université Mohamed V de Rabat. Je suis née à Tétouan, habite à Tanger et travaille à Rabat. Mes racines se mélangent entre la ville de Fès et le Rif.

Racontez-nous un peu votre parcours

En 2004, j’ai eu mon bac en lettres modernes au Lycée Ibn Al Khatib à Tanger et comme j’étais intéressée par la politique, j’ai opté pour la poursuite de mes études en Droit. J’ai obtenu une licence en Droit Public en 2007 à la faculté de droit de Tanger, ensuite un Master en Coopération Internationale et Développement en 2009 à la même faculté. Et pour couronner mon parcours universitaire, j’ai eu mon doctorat en relations internationales à la faculté de droit de Tanger en 2016 après cinq ans de recherche entre Tanger, Rabat, Paris et Bruxelles. J’ai été la première femme marocaine ayant soutenu une thèse sur un sujet qui relève de la défense et de la sécurité militaire, un domaine réservé d’habitude aux hommes.

Comment est née cette passion pour l’enseignement ?

En toute franchise, entre l’âge de 6 ans et de 8 ans,  je détestais l’école, mais grâce à l’accompagnement et la patience de mes parents, j’ai rattrapé. Ma passion pour l’enseignement a commencé depuis mon enfance à Tétouan. J’avais beaucoup souffert de la violence verbale et psychologique d’un instituteur en primaire.

Sous cette influence, mon souhait était de devenir institutrice pour participer à un projet éducatif basé sur une bonne relation avec les élèves, tout en ayant confiance dans leur potentiel à progresser. Ce souhait a grandi avec l’obtention de mon doctorat. Après des années d’expérience dans l’enseignement universitaire privé et public et après avoir constaté le nombre réduit des femmes professeures universitaires, j’ai choisi l’Université. C’est une tâche difficile mais qui permet de progresser sur le plan intellectuel et personnel aussi.

Quels sont les évènements qui ont changé votre vie ?

Les évènements positifs et négatifs m’ont permis de me métamorphoser complètement et ont participé à faire de moi une nouvelle personne plus mature, confiante et sereine après avoir été timide, intraverti et agressive. Parmi les évènements positifs, les voyages à l’étranger m’ont permis de découvrir la personne extravertie cachée en moi. Toutefois, je considère les évènements négatifs comme étant des opportunités qui ont beaucoup contribué à forger ma personnalité. Parmi ces évènements, je peux citer les contraintes financières, surtout en doctorat, j’ai dû travailler en parallèle pour acheter des livres, participer aux évènements scientifiques et assurer des voyages à l’étranger, la bourse n’était pas suffisante. Une citation du feu sa Majesté le Roi Hassan II m’a toujours accompagnée durant mes combats de vie : « Les batailles de la vie ne sont pas gagnées par les plus forts, ni par les plus rapides, mais par ceux qui n’abandonnent jamais ».

Quels sont vos projets à venir ?

Je suis professeure mais je suis aussi chercheure et la recherche du savoir ne se termine jamais. Sur le court terme, j’ai deux articles en cours sur deux thématiques qui relèvent de la sécurité et de la politique étrangère du Maroc.

Sur le long terme, je fais partie d’une équipe d’imminents spécialistes au sein de l’Institut des Etudes Africaines pour la réalisation d’un projet scientifique d’une grande importance pour le pays.

Quel est votre conseil pour les femmes qui veulent réussir ?

Je pense que la femme qui veut réussir devrait être libre de penser et libre de faire ses choix sans aucune influence extérieure. Elle devrait également aimer son travail, sinon elle ne va pas donner de son mieux et ne va pas être heureuse. Mais pour assurer cette liberté, elle devrait d’abord être courageuse et capable d’affronter les défis.

Que pensez-vous de la situation de la femme au Maroc ?

La femme marocaine est unique en son genre, elle est à la fois méditerranéenne, arabe, amazigh et africaine. Sur sa situation actuelle, en écoutant les histoires de nos grands-mères, je constate une grande évolution. Elle est présente aujourd’hui dans des postes de décision, elle est parlementaire, ministre, médecin, professeure, architecte, pilote, avocate, journaliste, etc. Mais elle est beaucoup plus présente dans des métiers manuels comme couturière, ouvrière, agricultrice, etc. Ceci est lié à l’éducation, car peu de femmes marocaines poursuivent leurs études c’est pour cela qu’elles travaillent dans ces métiers avec un salaire très bas par rapport aux hommes et sans être déclarée à la sécurité sociale. Sur le plan des libertés, la femme marocaine est plus libre par rapport à la femme maghrébine et arabe. Elle peut marcher tranquillement dans la rue, s’habiller et s’exprimer comme elle veut. Certes il y a des choses à améliorer, mais avec la participation de toutes et de tous, nous allons y arriver.

Votre avis sur le site ?

J’ai été étonnée de découvrir un portail dédié spécialement à la femme marocaine. C’est une première et une initiative à saluer chaleureusement.

Dernier mot ?

En dernier mot, je salue vos efforts pour la mise en valeur des profils de femmes marocaines qui influent vraiment sur la société chacune dans son domaine, face à la promotion de l’idiocratie sur les réseaux sociaux. Je vous remercie vivement pour cet interview.

 

Entretien réalisé par Aziz HARCHA
Juillet 2021

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